COP21 Paris, puis aujourd’hui COP22 Marrakech – agir sur le Climat ?

Share Button

« Une limitation à 2°C de l’augmentation de la température globale de la planète au cours du XXIèmesiècle nécessiterait une réduction de 50 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050″ – Claude Kergomard.

lamarcheUn sondage Ipsos commandé par La RechercheLe Monde et le Ministère de l’éducation nationale, publié en juin 2015 ici sur larecherche.fr annonce que les français(e)s ont une vision déformée du réchauffement climatique et que 51% d’entre eux se considèrent mal voire très mal informés sur le sujet.

En juillet 2015, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, déclarait qu’en l’absence de mesures ambitieuses prisent à la COP 21 de décembre 2015, le réchauffement pourrait atteindre de 5 à 6°C d’ici 2100.

Le 21 août 2015, Jean Jouzel, climatologue, vice-président du Giec, déclarait sur France Info :
« nous sommes sur un rythme d’à peu prés 1/100 ème de degré chaque année ». Il sous-entendait, 1/100 ème de degré d’augmentation de la température à la surface du globe. (1/1oo ème de degré par an, cela fait 1 degré par siècle). Puis il annonçait que pour la deuxième partie du 21ème siècle, le réchauffement serait de 4 à 5 degrés en moyenne globale. (lire l’entretien avec Jean Jouzel pour lemondedelecologie.fr publié en juin 2016 : diffusion médiaterre.org

En décembre 2015, la Cop 21 proposait l’adoption de l’accord de Paris – convention-cadre sur les changements  climatiques – qui stipule dans le rapport final à l’article 2, qu’il faut contenir « l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels… »

Aujourd’hui Lundi 7 novembre 2016 s’ouvre à Marrakech, au Maroc, la 22e conférence des Nations unies (ONU) sur les changements climatiques, ou COP22. Plus d’info sur lemonde.fr

Pour y voir plus clair, il est utile de lire l’article mis en ligne il y a presque 3 ans (le 01 janvier 2014) par Claude Kergomard, géographe : « Changement climatique : certitudes, incertitudes et controverses ».    Lire ici https://tem.revues.org/1424#abstract.
Claude Kergomard est professeur à l’Ecole normale supérieure, Département de géographie,  PARIS. (En retraite depuis le 1/9/2013)

Claude kergomard

Claude kergomard

Nous publions ci-après des extraits de « Changement climatique : certitudes, incertitudes et controverses » – texte intégral ici sur tem.revues.org

« Les deux années qui viennent de s’écouler ont été marquées par une controverse très médiatisée, utilisant les incertitudes avérées de la climatologie pour contester la réalité, l’ampleur et les causes du « réchauffement global ». Cet article propose une synthèse de l’état actuel des connaissances acquises et des incertitudes concernant le changement climatique contemporain, ses causes et sa singularité par rapport aux variations passées du climat, et les possibilités offertes par la modélisation du climat futur. Mais les incertitudes à propos du climat futur résident bien plus sur les choix économiques, sociaux et politiques que nécessite l’atténuation d’un phénomène avéré, que dans les incertitudes de la science du climat. »

« Agir sur le climat ?

Bien plus que sur la réalité du changement climatique et les incertitudes du climat futur, c’est en grande partie le coût économique et politique de l’adaptation et de la lutte contre le changement climatique qui suscite en réalité les controverses (DESSLER et PARSON, 2006). L’analyse des incertitudes scientifiques concernant le futur du climat est tout à fait légitime, mais le déni de la réalité du changement climatique ou des mécanismes de l’effet de serre additionnel qui en est la cause sont souvent motivés par le refus des politiques préconisées pour limiter les effets du changement climatique. De l’affirmation par le Président des Etats-Unis George Bush père, lors de la conférence de Rio en 1992 que « le mode de vie américain n’est pas négociable », à l’échec de la politique de limitation des émissions de carbone consécutive au protocole de Kyoto (1997) et à celui de la conférence de Copenhague en décembre 2009, l’accumulation des indices du changement climatique et la réduction des incertitudes scientifiques n’ont pas suffi à convaincre de la nécessité de politiques volontaristes dans ce domaine. Lorsque le diagnostic scientifique est destiné à préciser la nature des contraintes qui pèsent sur les choix qui s’imposent à nos sociétés, la tentation est grande de contester le diagnostic plutôt que d’affronter des choix qui dérangent.

La nature et la difficulté de ces choix a été clairement formulée lors de la préparation de la conférence de Copenhague : une limitation à 2°C de l’augmentation de la température globale de la planète au cours du XXIèmesiècle nécessiterait une réduction de 50 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050. Pour les pays développés, historiquement responsables de 80 % au moins du changement climatique depuis le XIXème siècle, et aujourd’hui encore de 60 % des émissions annuelles, cette réduction devrait être de 75 % en 40 ans ; en France, le « Facteur Quatre » (réduction de ¾ des émissions) reste l’objectif annoncé. Une telle évolution ne semble pas pouvoir résulter des seuls progrès et choix technologiques ; dans le cas de la France, l’évolution dans les vingt dernières années des émissions de gaz à effet de serre souligne l’importance des choix de société qu’impose cette réduction (tableau 1). Si les émissions liées à la production d’énergie primaire, à l’industrie et même à l’agriculture ont pu diminuer grâce à l’amélioration des procédés et à des choix technologiques favorables, il n’en est pas de même pour les deux secteurs qui sont le plus directement liés à nos modes de vie individuels, le transport et en particulier le transport routier, et le secteur résidentiel et tertiaire (qui inclut les consommations individuelles d’énergie pour le logement et les activités quotidiennes).

Un autre aspect des difficultés de mise en place d’une politique efficace de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle planétaire, qui a fortement pesé sur l’échec de Copenhague, est la question géopolitique. Déjà très présente lors de la négociation du protocole de Kyoto (1997), la dimension géopolitique du problème climatique s’est encore renforcée depuis. La distinction binaire entre pays développés (pays dits de l’annexe I – seuls soumis à la réduction de leurs émissions) et pays en développement, qui avait prévalu dans le cadre de Kyoto, paraît aujourd’hui très insuffisante pour une juste répartition des efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Alors que, de 1990 à 2007, les émissions par habitant des Etats-Unis ont légèrement décru (de 19,5 à 17,2 t/hab/an, que celles des Européens sont passées de 9,1 à 7,9 t/hab/an, les émissions des Chinois presque ont triplé pour atteindre 6,1 t/hab/an et celles des Indiens ont doublé mais ne sont encore que de 1,4 t/hab/an…

Conclusion

C’est donc dans un contexte de guerre économique et d’affrontements géopolitiques que doivent aujourd’hui se prendre les grandes décisions sur l’avenir du climat. Dans ce contexte, les incertitudes scientifiques évaluées avec plus ou moins de précision par les climatologues deviennent un enjeu important. C’est une raison supplémentaire pour lire dans le détail les travaux originaux des climatologues, dans leur version intégrale, et ne pas se contenter du débat superficiel qui nous est trop souvent proposé dans le contexte d’affrontements partisans. »
texte intégral ici sur tem.revues.org

Ajouter un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *